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Actualités de décembre 2024
Prime
Le versement par erreur pendant plusieurs années peut la rendre contractuelle
RAPPEL DES RÈGLES APPLICABLES
Si des sommes ont été indûment versées au salarié, l’employeur peut en réclamer le remboursement (application du principe civil de répétition de l’indu : articles 1302 et 1302-1 du Code Civil).
Il est de jurisprudence constante que pour en réclamer le remboursement, l’employeur n’a pas à prouver qu’il les a versées par erreur ou qu’il n’a pas commis de faute (Cass. ass. plén., 2 avril 1993, n° 89-15.490 ; Cass. soc., 14 décembre 2004, n° 03-46.836 ; Cass. soc., 17 mai 2011, n° 10-12.852 ; Cass. soc., 8 novembre 2023, n° 22-10.384).
Quels étaient les faits ayant donné lieu au litige ?
Une salariée perçoit une prime d’ancienneté conventionnelle de manière constante de 1994 à 2024 alors que compte tenu de son niveau de rémunération, elle n’y a pas droit.
L’employeur s’aperçoit de son erreur en 2015 et cesse de verser ladite prime à la salariée.
La salariée saisit le Conseil des prud’hommes afin de demander la reprise du paiement de sa prime ainsi qu’un rappel de salaire à ce titre depuis 2015.
Les juges du fond la déboutent de sa demande au motif que si l’employeur lui a versé une allocation supplémentaire conventionnelle jusqu’en 2014 inclus, il n’est pas justifié que la salariée avait atteint le niveau de rémunération exigé conventionnellement, de sorte que l’erreur de l’employeur, qui a certes perduré jusqu’à cette date, a porté sur le versement d’une allocation conventionnelle qui ne peut donc être constitutive d’un droit acquis ou d’un usage.
Quelle est la solution dégagée par la Cour de cassation ?
La Chambre sociale de la Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel et indique que la prime était devenue, en raison de son paiement systématique par l’employeur pendant 20 ans, un élément de rémunération de la salariée.
La Cour de cassation confirme ainsi la position qu’elle avait déjà adoptée dans un arrêt rendu en 2023 dans une affaire où, à la suite d’un défaut de paramétrage de son logiciel de paie, l’employeur avait versé par erreur, pendant 7 ans, des primes d’équipe et de casse-croûte à un salarié qui, faute de travailler en équipe, ne pouvait pas y prétendre, avant de décider d’en stopper le versement.
La Cour avait considéré que ces primes étaient devenues partie intégrante de la rémunération du salarié et que cette suppression constituait donc une modification unilatérale du contrat de travail qui nécessitait son accord préalable (Cass. soc. 13 décembre 2023, n° 21-25.501).
Ainsi, il apparait que pour la Cour de cassation, la répétition systématique pendant de nombreuses années de versements erronés de primes permet de retenir le caractère contractuel de l’avantage indu.
Juriste
- 10 janvier, 2025