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Actualités de décembre 2024
Inaptitude
Résiliation judiciaire à ses torts quand l’employeur tarde à engager la procédure
RAPPEL DES RÈGLES APPLICABLES
Lorsqu’un salarié est déclaré inapte par le médecin du travail, l’employeur a l’obligation de rechercher un poste de reclassement correspondant aux préconisations du médecin du travail et aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé (article L. 1226-2 pour l’inaptitude non professionnelle et L. 1226-10 pour l’inaptitude professionnelle).
Si le salarié n’a été ni reclassé ni licencié dans le délai d’un mois suivant l’avis d’inaptitude, l’employeur doit reprendre le versement du salaire (articles L. 1226-4 pour l’inaptitude non professionnelle et L. 1226-11 pour l’inaptitude professionnelle).
En application de l’article L. 1222-1 du Code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.
Quels étaient les faits ayant donné lieu au litige ?
Un conducteur routier est déclaré inapte par le médecin du travail le 11 juin 2019 à la suite d’un accident du travail.
L’employeur n’interroge le salarié sur une possible mobilité à l’étranger que le 10 octobre 2019, et demande des éclaircissements au médecin du travail quant à la portée de son avis et les aptitudes résiduelles du salarié le 14 octobre 2019.
Après le refus de mobilité du salarié, l’employeur attend le 20 novembre 2020 pour consulter les sociétés du groupe sur les possibilités de reclassement et entame finalement la procédure de licenciement en mars 2019, soit près de sept mois après l’avis d’inaptitude.
Entre temps, le 31 janvier 2020, le salarié saisit le Conseil des prud’hommes pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur.
La Cour d’appel refuse de reconnaître un manquement de l’employeur dans la mesure où l’obligation de reclassement n’est pas soumise à un délai strict par la loi.
Le salarié se pourvoit en cassation.
Quelle est la solution dégagée par la Cour de cassation ?
La Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel.
La Cour rappelle que si l’absence de reclassement effectif dans le délai d’un mois suivant l’avis d’inaptitude n’aboutit pas automatiquement à reconnaître un manquement de l’employeur à son obligation, cela ne dispense pas l’employeur de devoir engager les démarches de reclassement au plus tôt.
La Cour entend ainsi sanctionner l’inertie de l’employeur en cas de retard important et injustifié dans le lancement et la conduite des recherches de reclassement comme pouvant s’analyser en un manquement à l’obligation d’exécuter de bonne foi le contrat de travail et, en particulier, l’obligation de reclassement.
Dans son arrêt du 4 décembre, la Cour de cassation relève ainsi que le fait pour le salarié d’avoir été « maintenu dans une situation d’inactivité forcée au sein de l’entreprise, le contraignant ainsi à saisir la juridiction prud’homale », constituait un « manquement de l’employeur à ses obligations ».
Cela imposait donc à la Cour d’appel, contrairement à ce qu’elle avait jugé, de déterminer si cette inertie de l’employeur était d’une gravité suffisante pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail.
Juriste
- 10 janvier, 2025