J'ai le DROIT de savoir !
Actualités de novembre 2024
licenciement
LES PROPOS ECXESSIFS D’UN DIRECTEUR CONSTITUENT
UN ABUS DE LIBERTE D’EXPRESSION
RAPPEL DES RÈGLES APPLICABLES
Pour rappel, en application de l’article L.1121-1 du code du travail, sauf abus résultant de propos injurieux, diffamatoires ou excessifs, le salarié jouit, dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées.
Quels étaient les faits ayant donné lieu au litige ?
Dans cette affaire, le salarié cadre dirigeant (responsable stratégique pour les questions RH internationales et en charge des ressources humaines de plusieurs sociétés, membre du CODIR), a été licencié pour faute grave en février 2019.
Il lui était reproché un abus de sa liberté d’expression compte tenu de propos et envois de mails.
Il avait notamment sommé le directeur d’une filiale d’annuler son déplacement lié à la venue de la chancelière allemande, pour leur permettre de travailler ensemble sur le dossier de licenciement d’un autre salarié. Sa demande était accompagnée de commentaires désobligeants et condescendants : « Je suis sûr que Mme la chancelière
comprendra que vous deviez être à votre bureau » et « Mais il est vrai que c’est la semaine du festival de cinéma à …(lieu du déplacement) ».
Par ailleurs, il avait tenu des propos excessifs et agressifs envers son interlocuteur RH d’une autre filiale, qui lui reprochait plusieurs manquements dans le traitement du dossier d’un salarié coréen qui devait être transféré de Slovaquie en République Tchèque alors que, selon les constatations des juges, ces reproches étaient fondés.
Enfin, envers sa supérieure hiérarchique qui allait quitter son poste dans le groupe, il avait écrit un mail au président du groupe en évoquant le caractère toxique du management de cette dernière et le fait qu’elle quittait le groupe en laissant « son organisation globale dans un chaos indescriptible ». Il avait plus généralement adopté à l’égard de celle-ci un comportement hostile, tenant à son encontre des remarques acrimonieuses et répétées.
Il a contesté son licenciement estimant que ses propos n’étaient ni injurieux, ni diffamatoires ni excessifs. Il prétendait n’avoir fait qu’exercer sa liberté d’expression.
Constatant l’existence de propos excessifs qui caractérisent un abus du salarié dans l’exercice de sa liberté d’expression, les juges du fond l’ont débouté de ses demandes.
Le salarié se pourvoi alors en cassation.
Quelle est la solution dégagée par la Cour de cassation ?
La Cour de cassation approuve la cour d’appel et confirme le licenciement pour faute grave.
Elle rappelle qu’il résulte de l’article L.1121-1 du code du travail que, sauf abus résultant de propos injurieux, diffamatoires ou excessifs, le salarié jouit, dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression à
laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées.
Or par son appréciation in concreto, la cour d’appel avait bien caractérisé un abus de la liberté d’expression compte tenu des multiples propos excessifs, au regard notamment des responsabilités du salarié cadre dirigeant.
Ainsi des propos désobligeants du fait de leur nature ironique, agressifs, un comportement hostile, des remarques acrimonieuses répétées constituaient bien une faute grave, d’autant plus qu’ils émanaient d’un cadre dirigeant.
Il s’agit là d’une confirmation de jurisprudence prévoyant que si une divergence de points de vue est admissible, tout dépend de la façon de l’exprimer.
Juriste
- 3 décembre, 2024