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Cass. soc., 30 mars 2022, n° 20-15.022
Pour rappel : le temps de trajet du domicile au lieu de travail n’est pas un temps de travail effectif donnant lieu à rémunération. Il doit cependant donner lieu à l’attribution au salarié d’une contrepartie financière ou sous forme de repos, lorsqu’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail. Le Code du travail ne donne aucune méthode de calcul de cette compensation.
Dans l’affaire en cause, un syndicat contestait la validité de système de compensation des « surtemps » de trajet définis unilatéralement par l’employeur pour les salariés non sédentaires qui ne travaillaient pas habituellement au sein de leur agence de rattachement.
Il faisait notamment valoir que le seuil de déclenchement de l’indemnisation était sans commune mesure avec les trajets moyens domicile-travail identifiés par la Dares, de 50 minutes par jour aller-retour au niveau national et 68 minutes en région parisienne, le temps de déplacement excédentaire non indemnisé s’élevant dans le système attaqué à près de 2 heures.
La Cour d’appel de Paris avait donné raison au syndicat, considérant que les compensations prévues étaient déconnectées des temps normaux de trajet qu’elle avait défini en référence au trajet entre le domicile et l’agence de rattachement pour les salariés itinérants.
L’employeur avait alors saisi la Cour de cassation en prétendant qu’il ne revenait pas au juge d’apprécier le caractère suffisant de la contrepartie, et que la définition retenue par la Cour d’appel du lieu habituel de travail pour les salariés itinérants n’était pas conforme.
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la Cour d’appel et rappelle en premier lieu que les dispositions légales en matière de contrepartie à octroyer aux salariés en cas de temps de trajet inhabituel sont bien applicables aux salariés itinérants.
Elle valide ensuite le calcul du temps normal de trajet d’un salarié itinérant retenu par la Cour d’appel qui doit être calculé par rapport à l’agence de rattachement du salarié et non par rapport aux locaux des clients, en tenant compte du temps normal de trajet d’un salarié dans la région considérée.
Elle confirme enfin que les juges du fond sont habilités à vérifier que les contreparties allouées par l’employeur n’étaient pas « manifestement disproportionnées » et relève à ce titre que la Cour d’appel a estimé que les compensations accordées par la société étaient déconnectées des temps normaux de trajet.
La Cour de cassation en déduit que les contreparties octroyées par l’employeur avaient un caractère dérisoire et admet que la Cour d’appel ait pu lui ordonner de mettre en place un système de contreparties déterminées, région par région, en fonction du temps normal de trajet entre le domicile du salarié et le lieu habituel de travail retenu comme l’agence de rattachement du salarié.