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- 26/07/2022
Alors que la députée Céline Calvez déposait en mai 2021 un projet d’amendement pour faciliter le recours au télétravail durant les 3 derniers mois de la grossesse, la question du télétravail a été largement débattue dans les entreprises à des fins thérapeutiques.
La question est sensible car il faut rappeler que le télétravail est un principe reposant sur le double volontariat côté salarié et côté employeur comme le rappelle Marianne Le Gagneur, doctorante en sociologie à l’EHESS. Cependant, le droit du travail encadre et prévoit que le médecin du travail dispose d’un droit de préconisation envers votre employeur, pour proposer de vous mettre en télétravail en raison de votre état de santé, si l’entreprise dispose de moyens structurels et que le poste le permet.
Qu’est-ce que le droit de prescrire du télétravail pour raisons médicales ?
Dans le secteur privé :
Selon l’article L4624-3 du Code du travail, « Le médecin du travail peut proposer, par écrit et après échange avec le salarié et l’employeur, des mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou des mesures d’aménagement du temps de travail justifiées par des considérations relatives notamment à l’âge ou à l’état de santé physique et mental du travailleur. »
Attention, seul le médecin du travail pourra vous prescrire du télétravail, ce qui n’est pas le cas de votre médecin traitant.
Par exemple : s’il s’agit d’un salarié à risque face aux formes graves du Covid-19 ou si cette personne vit avec une personne vulnérable alors elle pourra bénéficier du télétravail en raison de son état de santé jusqu’à ce que la situation sanitaire s’améliore.
Dans le secteur public :
De la même façon et selon le décret n°2016-151 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique, le médecin du travail ou le médecin de prévention dispose d’un droit de préconisation de télétravail. Il rend un avis pour prescrire du télétravail si votre état de santé ou d’un handicap (1° de l’article 4 du décret), votre grossesse (2° de l’article 4 du décret) ou encore si vous disposez d’un congé proche qui justifie cette demande (3° de l’article 4 du décret). Ainsi, vous pouvez demander à télétravailler plus de 3 jours par semaine, jusqu’à 5 jours par semaine, pendant 6 mois maximum. Cette durée est renouvelable une fois par dérogation.
L’employeur peut-il refuser la proposition du médecin du travail concernant la préconisation de télétravail ?
Sachez que selon l’article L4624-6 du Code du travail et selon l’article 4 du décret n°2016-151 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique, la proposition du médecin du travail ne doit pas obligatoirement être suivie par l’employeur, si par exemple il estime que le poste ne permet pas de mettre en place du télétravail. Ainsi, en cas de refus, l’employeur doit informer par écrit le salarié et le médecin du travail « des motifs justifiant » le refus. Les considérations devront être objectives et clairement justifiées.
Exemple : Il peut estimer que les missions du salarié sont incompatibles avec du télétravail afin de refuser sa mise en place.
Que se passerait-il en cas de refus de l’employeur et de problème de santé ?
L’employeur est cependant tenu de « prendre en considération l’avis et les indications ou propositions » du médecin du travail, au risque d’engager sa responsabilité :
- L’employeur est tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise. La Cour de cassation, le 19 décembre 2007 avait rappelé dans un arrêt que l’employeur est tenu par cette obligation et doit en assurer l’effectivité en prenant en considération les mesures individuelles. Ainsi, l’employeur qui tarderait à appliquer les propositions médicales manquerait à ses obligations.
- De plus, si l’employeur ne justifie d’aucune démarche ou de recherches d’aménagement de l’emploi du salarié afin de favoriser le télétravail, sa responsabilité pourra être engagée. La Cour de cassation, le 19 décembre 2007 et le 15 janvier 2014 avait rappelé dans un arrêt que la proposition du médecin du travail constitue une proposition de reclassement du salarié que l’employeur doit étudier.
Ainsi, en cas de soucis, la responsabilité de l’employeur pourrait être engagée devant le Conseil des Prud’hommes. Pour cela, il faudra adresser une requête aux fins de saisine du Conseil des Prud’hommes, en complétant le document CERFA n°15586*09 puis en le déposant ou en l’adressant par voie postale au greffe du conseil de prud’hommes. La notice Saisine du conseil de prud’hommes par un salarié N° 52117#04 vous guidera dans vos démarches.